Cette eau si claire (Jean-Michel AUBEVERT)

Extrait

Les anges.

Ils portent sur leurs épaules le boisseau de leurs ailes.

La nuit leur répond, chuchotement de chouettes, 
chuintement d'abeilles.

Déverse la mer à des voiles de navires, 
traînées nuptiales
de nuits florales.

Sage,
l'enfant rassemble son cartable
d'un peu de sable vers l'avenir.

Un doigt sur les lèvres
hésite vers l'orage.

L'arbre de fruits mûrs foudroie au mur l'orange peinte sur des pelures d'enfant.

Etonné d'être nu sans l'être,
il aime et se voit naître.

Franchit la fenêtre.

Croit voir que la mer commence quand il ouvre les bras.

Il appartient,
capturé des épiphanies où s'ouvre l'été 
par la fenêtre ouverte
sur l'offrande des bruyères.

(Cette eau si claire)

L'eau, elle flotte entre le soleil sur l'eau et son sable y court la fable de sa mouche

Elle tire sur elle le feu de paille d'un chapeau de soleil.

Coule ses yeux dans sa sève
quand le soleil lui vient en bouche,
quand il la touche,
eau des lointains
où les vapeurs se rassasient
dans l'épaisseur de la vie

Elle grave dans le corps
le grain qu'elle a sous la peau.

Délasse la fatigue des écorces
au lacis des étoiles,
nettoie les pores
des poussières qu'ils respirent.

Epouse toute forme
aux bras qui l'épousent.

Elle est un serpent accouché
dans la paume du soleil,
le venin d'un levain
aux courbes d'une hanche,
la tête qui la penche
sur un regard fêté.

La verte chérie
plante l'arbre dans ses reflets,
enracine dans la mémoire des astres
la sève qui tourne
autour de la nuit
qu'elle rêve.

(Vert éclair)
Titre : CETTE EAU SI CLAIRE, 
suivi de VERT ECLAIR
Auteur : Jean-Michel AUBEVERT
Illustrations : Joëlle AUBEVERT
Collection : Sortilèges. Ce recueil imprimé sur papier japonais pour les textes et sur papier Canson 160 gr pour les illustrations, a été tiré à 60 exemplaires numérotés.
Ce titre est maintenant épuisé.
Format : 14 x 20 cm
28 pages dont 12 illustrations couleur
Prix TTC : 17 euros
Parution : février 2005
Eau des yeux, Eau des regards, ou sortie du puits, celle où le seau reconnait ses limites, tout est ici fluidité, pur échange où rien n’est altéré, où le regard s’abreuve au vis-à-vis des mots. Nous y sommes en beauté d’âme, selon l’image de Baudelaire, « Pur miroir ou toute chose est plus belle ».