D'ils et d'ailes (Pascal FEYAERTS)
C’est une petite femme dans une robe trop grande avec des manches trop courtes et des rêves qui dépassent par endroits. Seul le sable la devine. Elle porte en elle le poids des fenêtres qui l’habitent. Tout ce qui luit n’est pas dehors, elle ne le sait que trop. Elle nous regarde de l’intérieur de peur de nous rencontrer. Elle fuit le présent contigu et le futur imparfait, et craint la lumière comme le feu couvant une passion non assez instruite. Elle aime au ralenti car la lenteur la rassure. NOTES DE LECTURE
Par Anne-Marie-Derèse
" Ce qui m’interpelle quand mon regard caresse un livre, ce qui me séduit du premier abord, c’est l’illustration et le titre. Ils mordent dans mon imaginaire, je me sens attirée vers un monde qui ne m’appartient pas. Je ressens une sorte de petite secousse sismique. Je touche le livre avec précaution, avec douceur comme à l’approche d’un premier amour. Je l’ouvre petitement, du coin de l’œil telle une voleuse, une voyeuse serait plus juste. D’autres illustrations me font signe. Je saisis un texte au hasard et subitement je sais, oui je sais que je vais aimer, quelques mots m’accrochent " … la messe n’est jamais si bien dite que quand elle est noire ". Je me laisse emporter par La perdue " Je la regarde à travers ce bois où l’on ne vient que pour se perdre ". Pascal Feyaerts brosse ses personnages comme un peintre brosse un tableau. Il est visionnaire, nous donne des couleurs, plonge son pinceau ou sa plume au plus profond des étincellements. Quand je dis plume, je pense aile. Quand je dis aile, je pense elle "… dites-lui que j’ai retrouvé ses ailes et le chant de l’oiseau… ". Quand je pense il, l’obscur me murmure " … Il se croit au-dessus de tout soupçon, pourtant sa bibliothèque regorge de cadavres … ". Pascal Feyaerts et Derry Turla sont complices de la beauté et de l’étrange pour nous conduire dans l’infini des êtres. Éric Allard cerne avec la face claire et la face sombre de sa sensibilité les chemins labyrinthiques de cet homme des songes." |
Titre : D’ILS ET D’AILES
Auteur : FEYAERTS Pascal Illustrations : Derry TURLA Préface : Eric ALLARD Format : 14 x 20 cm Nombres de Pages : 59 pages 4 illustrations couleur sur papier Canson 160 gr Prix TTC : 16 euros ISBN : 978-2-930498-50-8 Comment porter un « verbe de lumière » au-dedans de soi pour faire voir ce que l’on voit, et faire entendre notre voix ?
Car, comme l’écrit Porchia, « personne n’est lumière de soi-même ». À la limite, faible lueur... Les personnages que Pascal Feyaerts présente sont en attente d’un don de temps. Ils sont dans une antécédence d’être, prêts à (re)naître sous le regard d’autrui — ou de quelque chose. Ce qui fait le sel et la grâce de ces textes, c’est aussi leur écriture, avec les écarts apportés au déroulement attendu de la phrase, les infléchissements de son cours comme si les mots, par un effet de clinamen, rompaient l’ordre de la prose pour produire des étincelles de poésie. Sous l’écorce verbale affleure la sève des images. Pascal Feyaerts est un « homme de songe », selon la belle expression de Bachelard, un rêveur qui ausculte le monde depuis son intérieur percé d’ouvertures multiples. Il porte ses regards loin et haut par l’embrasure des fenêtres pour mieux éployer ses paysages de mots. Ses petits poèmes en prose surprennent à chaque lecture, appelant à des revisites nombreuses. Comme des papillons, ils captent notre attention par l’un ou l’autre détail, une tournure de phrase ou de pensée, un charme indéfinissable. On tente alors de les saisir mais ils traversent nos filets aux mailles trop lâches. Ne reste de leur passage qu’un subtil frémissement d’ailes, comme un haussement de ton du réel, une augmentation d’être, un persistant éclat, une échappée hors des voix coutumières de l’Archipel Poésie... Extrait de la préface d’Eric ALLARD |